George Boole (1815-1864) |
En 1847 paraissaient deux ouvrages d'une importance capitale, The mathematical analysis of logic, being an essay towards a calculus of deductive reasonning de George Boole et Formal logic de De Morgan. Le nom de De Morgan est surtout resté pour sa formulation de deux lois importantes en logique des propositions. L'apport le plus important est sans conteste celui de Boole. Ce dernier traite la logique d'Aristote comme une algèbre. Ce qui, dans la logique traditionnelle apparaît comme une inférence faisant usage d'un minimum de mots est effectué, chez Boole, comme un calcul sur des signes algébriques dont l'interprétation la plus naturelle est qu'ils symbolisent des classes ou des opérations sur les classes. |
Boole nous donne ensuite un certain nombre d'axiomes pour ces opérateurs. Par exemple :
a.b = b.a est la propriété de commutativité de l'opérateur «.».
a+b = b+a est la propriété de commutativité de l'opérateur «+».
a.(b.c) = (a.b).c est la propriété d'associativité de l'opérateur «.».
a.(b+c) = (a.b)+(a.c) est la loi de distribution de «.» par rapport à «+».
a.a = a² = a. Cet axiome énonce que la spécification d'une classe par elle-même reproduit cette classe.
a.-a = 0 Cet axiome formule le principe de non-contradiction .
Il est clair que lorsqu'un certain nombre d'axiomes semblables sont donnés,
il devient possible de travailler à l'aide d'un calcul abstrait. On peut opérer
des transformations d'équations sans se soucier de ce que représentent a, b ou c. Notons en outre qu'il
est possible de représenter les syllogismes aristotéliciens dans la notation
algébrique de Boole. La proposition Tout b est a se transcrit b.a = b. Il est équivalent de dire de tout élément de la
classe b qu'il est aussi un élément de a ou de dire que b est
l'intersection de la classe a avec la classe
b elle-même.
Tout b est a Tout c est b |
b.a = b c.b = c |
Tout c est a | c.a = c |
Si l'algèbre de Boole était novatrice, elle n'en comportait pas moins de nombreux défauts. Elle fut reprise et perfectionnée par W. S. Jevons (1835-1882). Une synthèse de l'algèbre de la logique à été présentée par Schröder à la fin du siècle, et E. V. Huntington en a présenté une axiomatisation au début du XXe siècle.
Un antilogisme est une suite de trois énoncés qui, pris ensemble, est inconsistante. Christine Ladd-Franklin (1847-1930), qui introduisit cette notion, utilisa le fait qu'un syllogisme est valide si et seulement si la suite formée de ses prémisses et de la négation (ou contradictoire) de sa conclusion est un antilogisme pour mettre en évidence un principe unique dont découlent immédiatement les formes valides.
Dès l'antiquité, certains logiciens avaient constaté la présence de nombreux paradoxes au sein de la rationalité. En fait, on peut dire que malgré leur nombre, ces paradoxes ne sont que les illustrations d'un petit nombre de structures paradoxales. Nous nous intéresserons ici à une structure présente dans les paradoxes mégariques, du type «le menteur».
Bertrand Russell (1872-1970) |
Il existe deux types de classes : celles qui se contiennent elles-mêmes (ou classes réflexives : la classe des ensembles non-vides, la classe des classes,...) et celles qui ne se contiennent pas elles-mêmes (ou classes irréflexives : la classe des travaux à rendre, la classe des oranges sanguines, ...). La question posée est la suivante : la classe des classes irréflexives est-elle elle même réflexive ou irréflexive? Si elle est réflexive, elle se contient et se trouve rangée dans la classe des classes irréflexives qu'elle constitue, ce qui est contradictoire. Si elle est irréflexive, elle doit figurer dans la classe des classes irréflexives qu'elle constitue et devient ipso facto réflexive, nous sommes face à une nouvelle contradiction. |
Dans une bibliothèque, il existe deux types de catalogues. Ceux qui se mentionnent eux-mêmes et ceux qui ne se mentionnent pas. Un bibliothécaire doit dresser le catalogue de tous les catalogues qui ne se mentionnent pas eux-mêmes. Arrivé au terme de son travail, notre bibliothécaire se demande s'il convient ou non de mentionner le catalogue qu'il est précisément en train de rédiger. A ce moment, il est frappé de perplexité. Si ne le mentionne pas, ce catalogue sera un catalogue qui ne se mentionne pas et qui devra dès lors figurer dans la liste des catalogues ne se mentionnant pas eux-mêmes. D'un autre côté, s'il le mentionne, ce catalogue deviendra un catalogue qui se mentionne et qui ne doit donc pas figurer dans ce catalogue, puisque celui-ci est le catalogue des catalogues qui ne se mentionnent pas. Le paradoxe du webmestre. Les catalogues peuvent être remplacés par des pages Web et la relation «mentionner» par la relation «renvoyer» comme dans cette page. |
Définissons provisoirement le mensonge comme l'action de formuler une
proposition fausse. Le poète crétois Epiménide affirme : «Tous les
Crétois sont des menteurs», soit la proposition p. Comment
décider de la valeur de vérité de p ? Si p est vraie, comme Epiménide est Crétois, p
doit être fausse. Il faut donc que p soit fausse pour
pouvoir être vraie, ce qui est contradictoire. p est donc
fausse. Remarquons qu'on ne peut pas en déduire, comme dans le véritable
paradoxe du menteur, que p doit aussi être
vraie.
Selon Russell, les paradoxes qui viennent d'être mentionnés prennent leur source dans un usage autoréférentiel du discours. Le paradoxe du menteur, par exemple, aboutit à une contradiction du fait que l'énoncé "je mens" ou "les crétois mentent" figure lui-même parmi les énoncés qu'il décrit comme mensongers. Pour sortir de la contradiction, il convient, pour Russell, de distinguer des niveaux de langage (ou "types"), de manière à interdire un usage autoréférentiel du discours. Ainsi, on dira que l'énoncé "je mens" est un énoncé de niveau 1 qui décrit des énoncés de niveau 0 pour lesquels il constitue un métaénoncé. Les énoncés de niveau 1 ne faisant pas partie des énoncés décrits par les énoncés de niveau 1, l'énoncé "je mens" ne pourra pas se prendre lui-même pour objet, à moins de procéder à une erreur de détermination de type d'énoncé. |
Gottlob Frege (1848-1925) |
Gottlob Frege est considéré comme le père fondateur de la logique contemporaine. Ses ouvrages majeurs sont L'Idéographie (Begriffschrift, 1879) et les Fondements de l'arithmétique (Die Grunlagen der Arithmetik, 1884). 1. Le calcul propositionnel ou théorie des fonctions de vérité1.1. IntroductionL'expression proposition désigne un énoncé du langage ordinaire mais considéré du point de vue formel qui est celui de la logique. En clair, cela signifie que l'on traite seulement d'un certain type d'énoncés et que l'on néglige dans ce type d'énoncés une série de paramètres qui seront sans incidence logique. |
Les propositions envisagées ici sont ce qu'on appelle des fonctions de vérité. Ce sont des énoncés descriptifs d'un état de fait et susceptibles d'être vrais ou faux. S'il y a adéquation entre la proposition et le fait décrit, la proposition est vraie, s'il n'y a pas adéquation, la proposition est fausse. Ainsi l'énoncé Le chat du voisin est mort sera vrai si le chat du voisin est mort au moment où on l'énonce. Les fonctions de vérité ou propositions que nous considérons ici peuvent être simples ou complexes. Le chat du voisin est mort est une proposition atomique. Il n'est pas possible de l'analyser en des propositions plus simples. |
La logique propositionnelle ou calcul des propositions s'intéresse aux
relations entre propositions et aux opérations sur ces dernières sans analyser
la composition non propositionnelle des propositions simples. Le calcul
propositionnel est donc un calcul interpropositionnel dans la mesure où il ne
s'occupe que des fonctions de vérité et est soumis à la thèse d'extensionnalité
selon laquelle la valeur de vérité de toute proposition composée dépend
uniquement de la valeur de vérité des propositions composantes et est donc
formellement déterminable sans ambiguïté.
La première étape du calcul propositionnel est la formalisation des énoncés du langage naturel. Pour réaliser ce travail, le calcul propositionnel fournit trois outils : les variables propositionnelles, les constantes ou opérateurs logiques et les signes de ponctuation.
|
|
|
| |
|
Négation |
La négation est un opérateur qui ne
porte que sur une proposition, il est unaire ou monadique. Il ne pleut
pas s'écrit |
|
|
|
Conjonction |
La conjonction ou produit logique est un opérateur
binaire, elle met en relation deux propositions. Tout homme est
mortel ET Ma voiture perd de l'huile s'écrit (p |
|
|
|
Disjonction |
La disjonction ou somme logique
est, elle aussi, un opérateur binaire. (p |
|
|
|
Implication |
L'implication est également un opérateur binaire. Elle
correspond, EN GROS, au schéma linguistique Si...alors... . Si
j'ai le temps, j'irai au cinéma s'écrit (p (p Si le conséquent (ici q) est vrai, l'implication
(p En résumé, une implication est fausse si et seulement si son antécédent est vrai et son conséquent est faux. |
|
|
|
Bi-implication |
La bi-implication est, elle aussi, binaire : elle symbolise les expressions ... si et seulement si... et ... est équivalent à... L'équivalence entre deux propositions est vraie si celles-ci ont la même valeur de vérité. La bi-implication exprime donc aussi une forme d'identité et c'est pourquoi elle est souvent utilisée dans les définitions. |
|
|
Il est possible d'établir des équivalences entre ces opérateurs. Nous avons déjà vu comment le biconditionnel pouvait se définir comme un produit de conditionnels réciproques, voyons maintenant d'autres équivalences.
(p
q)
![]()
(p
q)
(p
q)
(
p
q)
(p
q)
(
p
q)
(p
q)
![]()
(p
q)
Sont à noter également les deux lois de De Morgan :
(p
q)
(
p
q)
(p
q)
(
p
q)
Elles permettent de transformer la disjonction en conjonction et vice-versa :
(p
q)
![]()
(
p
q)
(p
q)
![]()
(
p
q)